Je reviens de l’enterrement. Il faut bien revenir d’ailleurs ou de quelque chose. Enfin, elle, n’en est pas revenue.
J’y ai laissé quelques scories de lettres informelles, jetées au vent d’hiver, avec mes non-regrets éternels. En déposant mon bouquet d’artifices, pour un ultime baiser, je crois que…Oh, j’en suis même sure, j’ai ri ! Pas un petit rire discret, sous cape, non, un fou-rire à tordre les étincelles de l’en-faire-part. Je tentais juste de me couler dans l’ambiance, mais les braves gens n’aiment pas que …l’on ne soit pas conventionnel. En fin, ils n’aiment pas que.
Sa mise en bière s’est déroulée dans un recueillement aussi lourd que le poids des jours. Il était grand temps que le couvercle se referme, hermétiquement, pour tarir l’écoulement de ses mauvaises humeurs. Elle eut aimé une mise en champagne, mais elle n’avait pas signé de convention obsèques. Aussi avons-nous opté pour la formule économique peau-au-feu-pression.
Elle avait sa tête chafouine des vilains jours quand on lui a cloué le bec en même temps que le cercueil. Cet évènement valait-il quelques couronnes mortuaires? Pour cette reine éphémère, elles n’étaient que de papier doré. Entourée de ses fous à grelots, elle s’est éteinte, chandelle mouchée couchée, trois deux un zéro elle n’était plus !
Comme on brûle le roi carnaval à la fin des festivités, on l’a enfournée sous les accords d’une gigantesque musique de nuit, et dans les flammes qui crépitaient on a vu saint-guyguyter des sombres, des chagrins embrochés, des ratages cul-de-jatte, des désirs étêtés, des joies avalés, d’infâmes tours de vis, des ceps indignes, des abandons ligaturés puis des guerres familières fratricides fermentées, fin, fin, faim de trêve, anorexie de justice, gueules béantes…
Du brasier où s’échappaient encore quelques souhaits d’un autre temps, des myriades de clin d’œil scintillant et des espoirs ténus mais ancrés en matrice, surgit un petit bonheur;
un tout petit bonheur, en colimaçon. Il enfla, s’étira, grandit, s’ébroua dans les cendres encore chaudes, explosa en soleil bleu.
Il cria Je nais! Je reprends le sablier!
Je reviens de l’enterrement de LaFinDe. Enfin l’an neuf !
Eve de Laudec, entre fin 2013 et enfin 2014