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Rencontre improbable


Mandine a besoin d’un café .Trois heures qu’elle roule sur l’autoroute, des crampes dans les jambes, la nuque qui tire, et elle commence à bailler. Il est temps.
Esso ? Pourquoi pas, les cafés sont de toutes façons imbuvables dans ces stations, dans leur petit gobelet cartonné et un bâtonnet pour touiller ! Alors, ici ou ailleurs…

Elle se dirige, la démarche encore coincée, vers la boutique. Oui, ça presse, une visite au pipiroom s’impose en premier lieu. Propre, une fois n’est pas coutume. Bien sur le sèche-mains ne projette que de l’air froid ! Déjà qu’elle a les mains glacées…

Mandine se rapproche des machines à café et sent un regard insistant sur elle, suivant ses gestes. Elle suit ce fluide en retour, et tombe sur des yeux déjà rieurs. Elle se détourne, puis après avoir extirpé de son sac son portemonnaie, elle compte, pièce par pièce, mais il n’y a pas le compte ! Un porte-monnaie bourré pourtant, même pas fichu d’y trouver un euro trente ! Elle s’énerve, et fait tomber toutes ses pièces par terre. Quand elle se penche pour les ramasser, une main s’interpose, et ramasse les pépites jaunes. Au bout de la main, les yeux rieurs, et un demi-sourire… »Merci Monsieur »

Un peu gênée, Mandine va au rayon des sandwichs pour convertir un billet en pièces, mais elle a déjà mangé sa salade préparée avant de partir, alors une petite bouteille d’eau fera l’affaire. Retournant à la caisse, elle capte à nouveau le regard « mais il me drague ma parole ? Ou j’ai une saleté sur le visage ? Pas mal, d’ailleurs, ce mec, mon âge à peu près, cinquante, soixante, mais c’est moi qui le regarde maintenant, zut, que va-t-il penser ? »

Monnaie à la main, le compte exact pour son café, pour ne pas reproduire une nouvelle échappée de pièce, elle retraverse la boutique pour actionner la machine, toujours sous son regard mine de rien qui dit tout, qui la quitte et la reprend. Pas si désagréable, en fait, il y a de la sensualité dans ces yeux là, Mandine se sentirait presque belle à se sentir honorée de la sorte.
Tout le temps que dure la façon, le refroidissement, le mélange, la dégustation (oui, franchement infect, mais à son grand regret on ne trouve pas Clooney dans les stations-service), des pas à droite, à gauche pour se donner une contenance, pour ne pas avoir l’air d’être juste regardée sans voir, tout en jetant aussi des coups d’œil de son coté, et les regards se croisent, se décroisent, se multiplient, se mélangent…
Bon, en voilà assez, elle jette son gobelet dans la poubelle et sort, remonte dans sa voiture…..Et s’aperçoit que l’homme est dans la voiture garée à coté de la sienne, comme par un fait exprès. Elle ne l’a pourtant pas vu sortir.
Elle démarre, allume la radio, s’installe au fond de son siège, prête pour continuer sa route, règle un peu le rétro…oh…La voiture noire, derrière la sienne la suit, non elle se fait des idées, mais trente kilomètres plus loin la voiture est toujours là, accélérant quand elle appuie sur le champignon, ralentissant quand elle freine, changeant de file à sa suite, elle se prend au jeu, c’est assez excitant de sentir un homme la coller comme ça, reprendre un peu de distance, puis se rapprocher, puis il double, en la regardant avec un grand sourire au moment où il passe à sa hauteur…et se positionne devant elle !

Alors le jeu s’inverse, Mandine suit, elle prévoit ses directions, et la sensualité qui passait dans les regards s’installe dans ces carrosseries blanche et noires, cette danse nuptiale de deux oiseux de fer, comme si la première entrainait l’autre dans son sillon ils font deux cent kilomètres en se tenant compagnie, comme un long dialogue, en s’amusant de cette connivence…puis il met son clignotant et s’engage sur une aire de repos , et lui fait un grand signe d’adieu de la main quand elle passe.
Emoustillée, et un peu déçue de l’avoir perdu, elle continue sa route. L’essence venant à manquer, elle doit se réapprovisionner, et bifurque à son tour. Aie, un monde fou aux pompes, mais Mandine n’est pas pressée, elle repense à cet homme, c’était chaud, en fait, c’était bon, cet interlude, en attendant que les voitures avancent cul collé au capot de la suivante, elle laisse errer son regard à gauche, à droite…A droite, il est là, l’homme, dans une autre file ! D’un grand sourire, il lui lance « on prend un café ? »
Allez, pourquoi pas !voyons ce qu’il a dans le moteur !
Ils se retrouvent devant les machines à café, comme s’ils ne s’en étaient jamais éloignés, « Que voulez-vous ? »
« Un café s’il vous plait »
« Merci de m’avoir tenu compagnie tout au long de ces kilomètres que je n’ai pas vus défiler »
« C’était très sympa »
« Oui, amusant »
« Vous me plaisez »
Ca, c’est les yeux qui le disent, les yeux qui ne se quittent pas, qui tissent un lien charnel invisible des autres, mais bien palpable…
Ils font connaissance, deux enfants chacun, il arrive de Marseille, elle vient de Lyon, ils vont dans la même direction, dans la même banlieue, ils sont divorcés tous deux, il se raconte, un peu, beaucoup, elle aussi, un peu, juste assez pour lui laisser découvrir un mystère, le temps est suspendu, elle sent qu’il veut, il sent qu’elle a envie, sens en éveil qui font briller les pupilles, corps alertés, non ils ne se connaissent pas, mais ils ont tout leur temps, le temps d’une autoroute, le ten- tation, personne ne les attend, ils n’attendent plus personne, deux êtres posés sur ce serpent gris d’asphalte, ils ont pris le temps, oui, de s’arrêter, improbable rencontre…





Eve de Laudec
17 octobre 2010

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